Être parent est un exercice complexe. C’est un travail qui requiert de la tolérance, du respect et une certaine prise de conscience, de soi et de ses désirs profonds. Être parent implique également, et avant tout, de l’amour. Qu’en est-il pour un pervers narcissique, dénué d’amour, mais aussi d’empathie ? Cette compatibilité est-elle possible ? Comment repérer un parent pervers narcissique et faire face à sa perversité toxique ?
Comment repérer un parent pervers narcissique ?
“L'amour et la haine sont des parents consanguins.” selon un proverbe allemand. Il est vrai que l’amour et la haine se côtoient constamment dans une valse effrénée. Mais pour les parents pervers narcissique, l’amour n’a pour ainsi dire aucune place. Comment repérer ces parents pathologiques et manipulateurs, et quels sont leurs outils et comportements ?
Le pervers narcissique
Le pervers narcissique est émotionnellement immature. En effet, sa structure psychique basée sur le déni pathologique comparable à une psychose, le contraint à l’immaturité émotionnelle à vie. Il n’a ni empathie, ni émotion, ni culpabilité ni aucun amour pour quiconque (son enfant, sa famille..).
En conséquence, il est incapable de gérer quelconque frustration, et saute d’une humeur à l’autre. C’est sans compter sur une impossibilité totale de remise en question. Il gagne haut la main la première place du podium du cliché de l’adolescent en crise.
Le pervers narcissique, dont le trouble de la personnalité narcissique est toxique, a pour unique intention de nuire. Nuire à ses enfants, à sa famille, et à tous ceux qu’il rencontre.
L’autre pour lui, n’est en réalité qu’un objet. Ses enfants ne sont pas épargnés. Son enfant dans le cas précis, est une extension de lui-même dont il peut jouir entièrement : c’est un jouet qui lui appartient. Il va s’en servir pour mettre en avant sa personne ou détruire par pure jouissance perverse. Egocentrique, l’image qu’il dégage est centrale pour lui, et l’enfant est son faire-valoir : il accroît son narcissisme et se rassure sur sa toute puissance.
Les comportements pervers
Repérer un parent pervers narcissique passe par l’identification de ses comportements pervers par rapport à un seuil de "normalité'', à un parent sain.
“Diviser pour mieux régner" pourrait être sa phrase fétiche par excellence. Ce mécanisme relationnel le pousse à adopter des attitudes radicalement différentes avec chacun de ses enfants, et en élit un qui est l’enfant ultime par excellence. C’est ce qui crée des conflits dans la fratrie : sa toute puissance est majorée.
En effet, l’enfant n’est qu’une pièce rapportée pour le pervers narcissique. Et il le traite comme tel, sans aucun droit ni indépendance, aucun choix ni expression de son désir. C’est un comportement toxique et dangereux. Il dénie en conséquence l’identité propre et unique de ses enfants, voire leurs besoins primaires. Une violence, psychique et physique, digne d’une maltraitance moderne dissimulée sous une emprise et une perversion de taille. Il est dans un abus de pouvoir des plus retranchés.
En réalité, le parent pervers narcissique n’a qu’un objectif : rendre son enfant docile, qu’il soit à sa merci. Il ne se sert de l’enfant que comme d’un faire-valoir narcissique. Ces comportements outranciers se passent dans l’intimité, car il passe en réalité à l’extérieur du foyer pour un parent exemplaire. Il peut même passer pour un parent très impliqué..il est en réalité pire qu’un général des armées en temps de guerre.
Le parent manipulateur se projette sur son enfant, qui n’a pour lui qu’un intérêt de jouissance. Il le rejette et l'humilie, fait même en sorte qu’il échoue : il n’est jamais assez bien, jamais parfait. Lorsqu’il réussit, le pervers narcissique s’approprie la victoire : c’est grâce à lui que l’enfant réussit.
Ce sont ces situations perverses et répétées au quotidien, des comportements alarmants et malsains qui constituent la perversion à laquelle l’enfant est confronté.
Les outils
Le pervers narcissique excelle en matière de manipulation et de destruction. Ses outils sont nombreux, interchangeables et complémentaires. Un film d’horreur dans la réalité.
Le parent pervers aime humilier. Il aime intimider, dévaloriser, rabaisser, insulter et susciter un sentiment de peur. Il s’octroie un pouvoir majeur sur l’enfant, en pleine construction. L’acharnement et le harcèlement psychique sont quotidiens.
Outre la peur, le pervers manipulateur pathologique aime créer de la méfiance. Il aime créer du doute et des conflits, et créer de la culpabilité chez son enfant. L’isolement et la situation critique dans lequel il place l’enfant, font d’énormes ravages sur la construction psychique et la délimitation des barrières saines. Ce sont les fondations de la vie entière de l’enfant qui sont bouleversées.
Les outils sont tantôt des petites phrases qui blessent et des propos négatifs, de la double contrainte, de la culpabilisation, du chantage affectif, des menaces et du jugement permanent.
Tantôt de la flatterie excessive, des informations peu claires, le tout et son contraire.
Plus subtilement, il aime également formuler, par exemple, des demandes de dernière minute. Ainsi, il ne laisse aucune place à la réflexion de l’enfant.
En véritable roi de la manipulation, il aime prêcher le faux pour savoir le vrai, et aime semer une certaine confusion mentale à travers des règles ou des propos toujours plus fluctuants et contradictoires.
Enfin, il justifie ses actes pervers par des phrases réductrices. Il minimise sa perversité, en gardant son image de parent exemplaire : “c’est pour ton bien”. Son seul objectif est en réalité de se servir de l’enfant et de le détruire, et tous les moyens sont bons pour y parvenir.
L’accumulation de ces outils, sont à l’origine d’une éducation perverse qui endommage, instrumentalise et déshumanise l’enfant, son estime et sa construction en tant qu’être humain.
10 outils pour aider un enfant victime d’un parent pervers narcissique
Françoise Dolto disait des enfants, qu’ils sont les symptômes des parents. C’est d’autant plus vrai pour les enfants dont le parent est pervers narcissique. Soumis à une emprise très forte, les répercussions sont immenses : comment aider l’enfant qui la subit ?
L’enfant est par son âge et sa condition, prisonnier de la relation avec ses parents. Mais vivre avec un pervers narcissique est un vrai combat. La relation est étouffante et toxique.
En effet, l’enfant est, pour toute personne saine, un adulte en devenir. Pour le pervers narcissique, il n’est qu’un accessoire de l’histoire familiale. Un jouet de poche sur lequel il peut se défouler, une broche qu’il peut exhiber, symbole de sa réussite et prolongement de sa toute puissance narcissique.
L’enfant ne se rend souvent pas compte de la perversité de son parent manipulateur. Il est face à un système, le seul qu’il n’ait jamais connu. Il ne connaît pas d’autre organisation ou relation. C’est seulement lorsqu’il atteindra sa propre maturité émotionnelle qu’il réalisera le comportement toxique du parent pervers narcissique.
Ce système relationnel est cependant si intrusif, que l’enfant ne tarde pas à développer des troubles, réels symptômes de son mal-être psychique. Cauchemars, maux de ventre, eczéma, troubles alimentaires.. Ces symptômes sont une demande inconsciente, une manifestation externe (la psychosomatisation) et surtout un appel à l’aide non conscient.
Voici quelques outils pour aider l’enfant.
1. Lui montrer le chemin
En tant que parent sain, vous êtes l’opposé du parent pervers narcissique. Vous êtes l’unique cadre, le lanceur d’alerte capable de ressentir et de corriger la trajectoire. Vos ambitions et vos intentions sont sincères et authentiques, et c’est cette voie que vous devez montrer à votre enfant. Montrer vos défauts, vos regrets, vous remettre en question mais aussi montrer vos forces, votre amour et votre empathie.
Sans pouvoir sur le parent toxique, le parent sain a le pouvoir d’agir de son côté pour l’enfant. En effet, le pervers narcissique est structurellement incapable de changer ou de se remettre en question. Son objectif étant de nuire, il est important de ne se concentrer que sur soi et l’enfant.
2. Les 5 piliers
Il existe 5 piliers indispensables au bon développement d’un enfant, dont il faut s’assurer.
- La sécurité physique, émotionnelle et psychique
- Le sentiment d’individualité et d’identité propre
- Le sentiment d’affiliation et d’appartenance à un groupe
- La confiance en ses capacités et en ses compétences
- La possibilité de s’exprimer (désirs, objectifs..)
En effet, le parent manipulateur détruira la majorité, ou tous ces piliers. Les uns en interaction avec les autres, il est important que l’enfant trouve chez le parent sain la place de les étudier et de les développer.
3. Donner des limites saines
Pouvoir donner des limites saines à l’enfant victime d’un parent narcissique est primordial. Santé, bien-être, bonheur ou encore éthique. Vous devez comprendre que vous êtes le seul parent à éduquer votre enfant. Le pervers narcissique, n’est non seulement d’aucune aide ou apport bénéfique, mais il est de plus destructeur, fourbe et sournois.
Donner à l’enfant ses responsabilités, de la considération. Cela passe ainsi par le fait de se coucher à des heures fixes, de se brosser les dents, de manger sainement ou encore de ne pas se dévaloriser lorsqu’il n’arrive pas quelque chose.
Lui faire savoir qu’il a le droit de poser ses limites, ce qu’il souhaite et ce qu’il ne souhaite pas. Apprendre à établir des frontières, avec intérêt, bienveillance et soutien authentique et sincère.
4. Lui montrer qu’autre chose existe
L’enfant naît dans une famille, dans un système de relation unique à ses yeux. Il n’en connaît pas d'autres. Il est donc important de lui montrer qu’autre chose existe, et que la vie est faite de milliers d’autres configurations. Regarder un film ou encore l’emmener dîner et dormir chez un couple d'amis, est un bon exemple. Il est vital pour l’enfant et son développement qu’il saisisse que la situation qu’il vit est unique, et qu’il peut aspirer à autre chose, à vivre autrement, aujourd’hui comme dans le futur.
5. Lui expliquer qu’il n’est pas coupable
Les enfants sont structurellement incapables de remettre en question l’amour de leurs parents envers eux, quelle qu’en soit sa forme. S’il est face à de la violence, à des insultes ou de l’humiliation, il se construira dans la croyance qu’il en est responsable..et qu’il le mérite et qu’il est coupable de ces violences. Il est donc vital d'expliquer à l’enfant qu’il n’est pas coupable. C’est un enfant.
6. L’aider à se construire
Une étape également extrêmement importante, est d’aider l’enfant à se construire. L’accompagner dans une autonomisation en accord avec son âge.
C’est aussi important de l’encourager à développer son esprit critique, en lui demandant son avis, en le questionnant, afin de lui permettre d’apprendre à réfléchir par lui-même. Cela lui permettra de reconnaître ce qui est bon ou mauvais, ce qui est tolérable ou non, ce qui est “normal” ou non.
C’est aussi lui apprendre la notion de responsabilité (que le pervers narcissique n’a pas). En effet, le parent manipulateur rejette systématiquement la faute sur les autres : il n’a donc pas d’exemple viable sinon le vôtre. Ce que c’est que d’avoir tort ou raison, et qu’il est bon dans certaines situations de reconnaître ses torts et de s’excuser.
En effet, le pervers narcissique en outrepassant toutes les limites saines, dont la loi, le respect et la bienveillance, brouille les limites saines de conduite envers soi et le monde.
L’accompagner donc, dans la construction de son identité et de son individualité. L’aider et lui apprendre à s’affirmer, car aucune place ne lui est attribuée : il est qui le pervers lui demande d’être.
Lui apprendre à demander, à poser des questions, à donner son avis. Lui faire savoir dans une relation de communication bienveillante qu’il a le droit d’exister et de prendre position.
7. Ne pas mentionner le parent toxique
Les enfants ont un amour inconditionnel pour leurs parents, même le parent toxique pervers narcissique. De surcroît sous leur emprise, ils sont souvent loyaux et attachés à ce parent qui est et restera..leur parent aux yeux de la loi. Il est donc primordial de ne jamais mentionner le parent toxique en mal. Même si c’est compliqué, et que le parent manipulateur le fait sûrement de son côté, il s’agit de mettre de côté sa haine et son désespoir face à la situation. Cela risquerait de créer un conflit de loyauté et renforcer une aliénation parentale qu’il faut à tout prix éviter.
8. Ne pas critiquer l’autre parent
Attention de ne pas critiquer ou attaquer frontalement auprès de l'enfant le parent pervers narcissique : l'enfant lui sera toujours loyal.
De la même manière, rien ne sert de confronter le parent pervers narcissique. Ce dernier ne changera pas et pourra au contraire se braquer. Il pourra même priver l'enfant comme vengeance de votre comportement.
9. Lui permettre d’extérioriser
Comme pour tout enfant, et d’autant plus dans le cas d’un enfant qui subit les déboires d’un parent manipulateur pathologique, il est important de permettre à l’enfant d’extérioriser. L’inscrire à un sport, le faire sortir un maximum qu’il côtoie d’autres enfants etc. Car les manifestations et les traitements du parent narcissique éveillent toutes sortes de sentiments négatifs pour l’enfant (colère, rage, dégoût, haine, violence, idées noires). Pouvoir trouver un défouloir est primordial voire vital pour libérer les tensions de l’enfant et favoriser un développement sain.
10. Anciens enfants, futurs adultes
Enfin, pouvoir trouver un soutien professionnel est indispensable. C’est un moyen pour les enfants, de comprendre et de créer leur identité. De se défouler aussi parfois, de prendre du recul. Comprendre qu’ils ne sont ni fautifs, ni coupables, ni de mauvaises personnes.
C’est aussi un moyen pour les adultes, anciens enfants abîmés par un parent toxique, de débuter un travail de reconstruction. L’enfant intérieur est et sera toujours là, et il est primordial de se libérer de cette camisole émotionnelle pour pouvoir avancer.
La thérapie en ligne, via visioconférence est un avantage qu’apporte la modernité : trouver le bon professionnel, efficace et véritable soutien émotionnel et moral, pour qui les bâtisses de la pathologie de la perversion narcissique n’ont aucun secret. Personne ne sort indemne de traumatismes répétés et chroniques. Mais il est possible, avec l’attention nécessaire, de réapprendre à s’apprivoiser, à vivre, et à s’aimer.
Vivre, c’est se reconstruire en permanence, au fil des saisons.