“Tu auras beau soigner au mieux un serpent, à sa première fureur tu recevras ta rétribution.” Vouloir soigner un pervers narcissique est comparable à cet acte parfaitement décrit par Abu Shakour. Peut-on réellement soigner un pervers narcissique, personnalité manipulatrice et toxique par excellence ? Et pourquoi vouloir le soigner ?
Portrait du pervers narcissique
Définition
On appelle pervers narcissique toute personne atteinte d’un trouble de la personnalité narcissique. Le pervers narcissique est un individu qui, dans son enfance, a érigé un mécanisme de défense en réponse à une agression extérieure. Un clivage s’est alors créé dans son esprit, une fracture, comme carapace conditionnée.
En effet, le narcissisme est un élément fondamental et primaire de la personnalité. Il se développe dans l’enfance et est en lien direct avec l'estime et la confiance en soi. Le narcissisme équilibré et sain permet de vivre avec soi et les autres, en concordance avec ses propres ressources, qualités et défauts dans un respect authentique (sans idéalisation ni dévalorisation de soi ou des autres).
Ce narcissisme est cependant attaqué à de nombreuses reprises (par des commentaires désobligeants, des événements marquants, des relations). Résultat de quoi, se forment alors dans l’esprit des failles narcissiques. Comparables à des puits, ces failles sont plus ou moins importantes selon la personnalité de chacun et la caractéristique plus ou moins profonde de l’élément déclencheur. Chez le pervers manipulateur, ces failles narcissiques sont immenses.
Perversion et narcissisme
La perversion qui y est attachée pousse le pervers narcissique à faire passer ses besoins avant ceux des autres, d’une façon excessive et pathologique. Il est dans la recherche constante de domination afin de tirer profit d’une situation. Dénué d’empathie et de sentiments, cela le rend souvent dangereux, rigide et dominateur. L’émotion la plus élémentaire lui est inaccessible : il est aussi froid et rigide qu’un bloc de glace.
En réalité, le pervers narcissique a fondamentalement besoin de détruire l’autre pour exister. C’est un mécanisme pervers et pathologique, dont le fonctionnement cruel est né de sa prédisposition dans l’enfance. C’est ainsi, et seulement ainsi, qu’il vit sa relation à l’autre.
Ce qui caractérise le trouble de la personnalité narcissique du registre de la psychose, c’est qu’il vit structurellement dans un déni pathologique. Il n’est pas conscient de son trouble et ne peut se remettre en question à cause de son clivage. En effet, la violence dont il use, l’instrumentalisation perverse de l’autre ou encore sa séduction pathologique font de lui un véritable prédateur.
Cette affirmation répond en partie à une question qui se pose souvent dès lors qu'une personne a un lien affectif avec un pervers narcissique : peut-on guérir un pervers narcissique ? Ou, est-ce que le pervers narcissique peut être soigné ?
Peut-il guérir ?
Un changement possible ?
Comme évoqué précédemment, le pervers narcissique vit dans le déni. Il est incapable de se rendre compte du trouble dont il est atteint, et parallèlement incapable de se remettre en question. C’est une des impasses majeures de cet individu. Il n’a accès qu’à peu de ressources émotionnelles et psychiques, pourtant vitales au bon développement d’un être humain et d’un adulte heureux.
Cependant, pour se soigner et changer, il faut déjà le vouloir.. et en être conscient. Sans capacité à se questionner, à se remettre en question, à évoluer en société avec lui-même et les autres, et dans le déni le plus extravagant, le pervers narcissique n’est pas en mesure de travailler sur lui-même.
C’est, pour le pervers narcissique, structurellement impossible. Il ne souffre pas, et n’éprouve donc aucun besoin de changer. Ce qui fait défaut au pervers manipulateur c’est qu’il n’est pas conscient de sa cruauté et des conséquences qu’il crée chez autrui, puisque les émotions ou encore l’empathie lui sont inconnues.
Par conséquent, le pervers manipulateur rejette dans un automatisme immoral la faute sur les autres. Comme un boomerang, il renvoie l’appareil laissant ses victimes dans la plus grande stupéfaction. “A cause de toi nous ne sommes pas arrivés à l’heure, tu es trop lourde pour la voiture, tu la ralentis.” (même si la cause du retard est un détour car il refuse de suivre la carte). Le pervers polymorphe ne veut pas changer, car il en est incapable. Il ne changera pas, il est ainsi structuré comme l’émail d’un diamant.
La guérison impossible ?
Parce qu’il n’est pas conscient de son trouble et du mal qu’il cause, le pervers narcissique n’est pas en capacité de changer. Point de départ de toute guérison, il n'est alors pas en capacité de se soigner. La voie thérapeutique de la cure par la parole, la catharsis reprise par les plus grands psychanalystes, est donc impensable et se heurte à un mur : celui de la limite de l’esprit du pervers narcissique, piégée dans sa structure pathologique.
La médication est également exclue pour les raisons évoquées précédemment : ce n’est pas un virus que l’on pourrait éradiquer, mais un trouble de la personnalité profond et grave dont sont atteints ces individus. Pas de pilule magique de réparation de la faille narcissique, de l’estime de soi ou de son comportement social. L’esprit Kintsugi n’est applicable qu’aux individus capables d’une réflexion et d’une introspection aboutie.
En réalité, la rencontre entre un pervers manipulateur narcissique et un thérapeute est basée sur un lien biaisé. Le pervers n’est que dans la séduction et la manipulation, et sa réalité psychique est chaotique et désorganisée. Son dialogue est en revanche construit de toute pièce et à l’opposé d’une discussion authentique. Il perçoit même l’intervention du thérapeute comme une intrusion.
Finalement, ce sont les proches du pervers narcissique (conjoint, collègue, enfant) qui le réalisent et en souffrent. Déboussolés et anéantis, souvent sans connaissance de la pathologie profonde qu’est la perversion narcissique, ils sombrent dans l’espoir d’un changement positif. D’une prise en charge thérapeutique et d’un accompagnement adéquat, lui qui semblait si bon dans les premiers instants de la relation. La majorité de son entourage reste cependant admiratif de ce merveilleux personnage charismatique, frôlant la perfection et suscitant l'envie. Une illusion dangereuse.
Attention, danger
A cet égard, ce sont ses proches qui se heurtent à un refus brutal et qui en paient le prix fort. Montrer au pervers narcissique qu’il est malade, lui prouver par (a + b) que son comportement est pathologique est comme chercher une place de parking sur la Côte Basque en plein mois de juillet. C’est impossible.
Le risque est même que le pervers narcissique mette tout en œuvre afin de retourner la situation contre vous. Il vous accusera et vous rendra responsable de son malheur apparent. Le pervers narcissique peut même aller jusqu’à vous persuader que vous êtes celle qu’il faut soigner. Dans une autre configuration terrifiante, il pourrait vous traiter de folle et manipuler le corps médical jusqu’à votre internement en psychiatrie.
Par conséquent, il est donc bon de se tenir aussi éloigné que possible d’une quelconque accusation, et de tenir compte du fait que le pervers narcissique ne peut pas se soigner ou guérir.
Pourquoi vouloir le soigner ?
Questionner la relation
Une des caractéristiques principales des victimes du pervers narcissique est l’empathie, le grand cœur. La victime d’un manipulateur est souvent d’une extrême gentillesse et très élevée sur le plan humain et émotionnel. Elle peine donc à croire que l’on puisse humainement et non consciemment détruire et nuire à autrui par pure jouissance et sans en être conscient.
La relation, le lien que la victime entretient avec le pervers narcissique la plonge également dans une soumission psychique forte et un déni de haut vol. Le pervers qui dépose un voile de brume sur ses yeux et son libre arbitre, trompe sa victime qui ne sait plus où donner de la tête. Elle doute alors de sa pathologie et ne sait plus comment réagir.
Si la volonté de vouloir le soigner est forte, il est important de se questionner sur la genèse de cette intention. Syndrome du sauveur ? Amour ou attachement ? Lien familial ou dépendance affective et physique ? Faille narcissique propre ?
La thérapie
La thérapie peut être un moyen de répondre à ses questions et de découvrir la motivation derrière cette envie de l’aider. Derrière ce besoin de soigner un pervers narcissique pathologique et destructeur dont l’unique but est de nuire. La thérapie en ligne via visio consultation, peut être un moyen rapide et efficace de répondre à ces questionnements. C’est un processus de reconstruction personnelle impérative afin de sortir de l’emprise et de la dépendance affective.
Il est également important via ce travail sur soi, d’accepter la maladie de l’autre. De l’accepter, mais aussi de renoncer à l’autre pour sa propre survie et sa santé psychique et physique. Vouloir guérir un pervers narcissique serait comme tenter de gonfler un ballon percé de tous les côtés, dont l’intérieur est rempli d’un gaz euphorisant laissant la personne qui les respire sous dépendance. Gaz euphorisant menant par ailleurs après plusieurs inspirations, à une mort très certaine.
Vouloir l’aider, c’est perdre votre temps. Le pervers narcissique ne changera pas, et ne peut être soigné. Il est condamné à sa toxicité qu’il partage avec véhémence à qui veut bien la subir. Les violences qu’inflige un pervers narcissique manipulateur sont destructrices. Ainsi, fuir reste encore la meilleure des portes de sortie.